Exécution d'une truie

En 1403 à Meulan, une truie fut condamnée à mort pour avoir mangé un enfant.
Voici le compte des frais de l'exécution :
« A tous ceux qui ces lettres verront, Symon de Baudemont, lieutenant à Meullent de noble homme mons. Jehan, seigneur de Maintenon, chevalier chambellan du Roy nostre sire, et son bailli de Mantes et dudit lieu de Meullent: Salut.
Savoir faisons, que pour faire et accomplir la justice d'une truye qui avoit dévoré un petit enfant, a convenu faire nécessairement les frais, commissions et dépens ci-après déclarés. C'est à savoir :
Pour dépense faite pour elle dans la geôle: six sols parisis.
Item, au maistre des hautes oeuvres, qui vint de Paris à Meullent faire ladite exécution, par le commandement et ordonnance de nostre dit maistre le bailli et du procureur du roi: cinquante-quatre sols parisis.
Item pour la voiture qui la mena à la justice: six sols parisis.
Item, pour cordes à la lier et hâler: deux sols huit deniers parisis. »


En 1131, l'héritier du trône de France, Philippe, fils aîné de Louis VI le Gros avait été renversé de cheval dans la rue du Martroi, à Paris, par un des pourceaux qui encombraient alors les rues de la capitale et était mort des suites de cette chute. Depuis, on avait interdit d'élever des porcs à l'intérieur de Paris, comme en témoigne l'article 248 de l'ordonnance du 30 janvier 1350 :
« Nul ne soit si hardy d'avoir, tenir, nourrir, ne soustenir dedans les murs de la ville de Paris aucuns pourceaux. Et qui sera trouvé faisant le contraire, il payera dix sols d'amende. Et seront les pourceaux tuez par les sergens ou autres qui les trouveront. Et aura le tuant la teste; et sera le corps porté aux Hostels-Dieu de Paris, qui payeront les porteurs d'iceux. »

Autre affaire, au XIIIème siècle, dans le doute de la responsabilité morale des animaux, on les poursuivait en justice. Différents animaux étaient jugés, mais neufs fois sur dix, il s'agissait d'un porc. D'abord, à cause du nombre. Il y avait plus de cochons en France que de moutons. On les retrouvait un peu partout, même dans les rues. Ensuite, parce que le cochon fut longtemps considéré comme le plus proche parent de l'homme, aussi désagréable cela puisse-t-il être à lire pour un homme moderne. Avant Darwin, et depuis l'antiquité, le cochon était étudié, disséqué pour sa ressemblance avec l'homme. La comparaison ne se jouait pas sur le physique, je vous rassure, mais sur l'anatomie interne. Similitude donc, qui mettait en question la responsabilité morale du cochon.
Grâce à des archives d'époque, nous avons pu avoir connaissance de l'affaire de la truie de Falaise, cette même ville qui vit grandir Alexandre le conquérant. Coupable d'avoir tué un nourrisson, la truie fut habillée en homme, menée au tribunal, jugée, condamnée, puis mutilée à mort. Et il y eut foule pour assister à ce supplice, dont le Vicomte de Falaise, bailli royal, qui prononça lui-même la sentence. Parmi l'assistance, on dénombrait quantité de cochons également. Car le procès servait d'exemple pour les autres congénères afin qu'ils n'aient point l'idée de commettre un forfait semblable. Et si l'idée leur parvenaient au cerveau, que celle-ci en fut vite chassée par le souvenir funeste de leur parent tué en place de grève.
La mort pour cette truie fut des plus douloureuses : le bourreau lui trancha le groin après l'avoir suspendue par les pieds de derrière. Ensuite, la dépouille de la truie eut droit à plusieurs tours de place, traînée à même le sol, puis on brûla les restes sur le bûcher. Pour immortaliser l'évènement, le vicomte de Falaise commandita un tableau afin de rappeler à tous le méfait.


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